Phil EDENGARDEN

Horloge

Vivre en pleine conscience

Que faire lorsque nous sommes vaincus par le stress, lorsque nous sommes paralysés par la peur ou par l’inquiétude chronique au sujet de notre avenir, au sujet de l’avenir de nos enfants, dans un monde où tout change et bouge sans cesse? Que faire quand nous sommes pris d'une crise de panique aigüe? Où trouver encore un point de stabilité sur lequel s’appuyer?

Bien-sûr, nous pouvons prier, nous en remettre à Dieu, invoquer l'Esprit-Saint, faire des actes d'abandon dans la foi et espérer être exaucés rapidement. Mais tout le monde n'a pas la foi.

Cette page au sujet de la pleine conscience (« Mindfulness ») expose quatre principes de base que nous pouvons tous adopter au quotidien si nous souhaitons guérir de l’angoisse et de l’anxiété. Ces principes sont très simples à comprendre et faciles à mettre en œuvre. Qu’attendons-nous pour les appliquer et pour en éprouver aussitôt les bienfaits?

Premier principe : Le corps et la respiration

La respiration est le premier indice de mon état mental. Si ma respiration est profonde et trouve sa source dans le bas ventre, elle témoigne d’un état de détente, du confort, du sentiment de sécurité. Si, par contre, la respiration est saccadée, qu’elle se concentre dans la gorge, il est clair que je suis dans un état d’anxiété : je suis perdu quelque part dans ma tête.

Alors, au lieu de passer ma vie là-haut, dans ma tête, dans une cage de pensées qui se trouve en dehors du moment présent, il est utile de ramener ma conscience à l’intérieur de mon corps. Cela me permet d’interagir avec le moment présent au lieu de rester connecté à toutes ces choses qui se passent dans ma tête et qui ne sont pas en phase avec la réalité. Il s’agit donc de ramener mon « moi » ici, dans mon corps, dans le moment présent.

Respirer profondément me conduit donc dans un état de relaxation alors que respirer de façon saccadée provoque et entretient en moi un sentiment de panique et d’anxiété. Il est donc possible de changer d’état d’esprit rien qu’en modifiant ma manière de respirer.

Il est intéressant de constater que la respiration fait partie de ma vie à chaque instant et que je n’y prête que rarement attention. Il est possible que si je prêtais un peu plus d’attention à ma respiration, je vivrais davantage dans mon corps. Or, lorsque j’intègre mon corps, je peux être tout à fait conscient de l’état d’esprit dans lequel je me trouve. Suis-je dans un état d’interaction avec les autres et le monde, ? Suis-je en train de goûter à la liberté, à la joie ou suis-je dans un état de panique et d’anxiété ? Mon corps est donc le révélateur de mon état intérieur. Si mon corps est détendu, il est clair que mon état d’esprit est tranquille, tandis qu’un corps tendu, contracté, témoigne d’un état de stress et de panique. Mon corps est ce portail qui me permet de passer instantanément d’un état d’anxiété à un état qui conjugue bien-être et liberté en pleine conscience.

Tel est mon mode de respiration, tel est mon état d’esprit du moment. La meilleure question que je puisse me poser à différents moments de la journée est la suivante : Mais où donc est passée ma respiration ? Cela permet de vérifier dans quel état de conscience je me trouve et, au besoin, d’aller récupérer mon souffle. Cela me permet de me recentrer, et d’être totalement présent à ce qui est en train de se passer ici et maintenant.

Je puis également ajouter un paramètre non négligeable à ce que je fais au moment de respirer profondément. Je puis y ajouter la constante du sourire. J’expire mon stress, j’inspire profondément, et lorsque j’expire à nouveau, j’y apporte un joli sourire. Dès lors que je joins ce sourire à la respiration profonde, il est quasi impossible d’être encore dans un état de panique et d’anxiété. Agir très concrètement de cette façon peut me conduire peu à peu à faire l’expérience de plus de liberté.

Deuxième principe : Ici et maintenant

La question de départ est toute simple : Qu’est-il en train de se passer à cet instant précis ? Que se passe-t-il à l’instant-même ?

Maintenant est la seule chose qui existe réellement. Quand je pense à l’avenir, à quel moment suis-je en train d’y penser ? Dans le présent. Quand je pense au passé, à quel moment suis-je en train d’y penser ? Dans le présent. Tout ce qui se passe, tout ce à quoi je pense, tout cela a lieu maintenant. Si je pense à ce qui va arriver dans cinq ans ou dans une semaine, je le fais maintenant. Si je pense à ce qui s’est passé il y a une semaine ou il y a cinq ans, je le fais maintenant. Quand je comprends cela, je réalise que la pleine conscience du moment présent est la clef de lecture de tout ce qui se passe, de tout ce qui s’est passé, et de tout ce qui va pouvoir se passer.

Il est tellement facile, pour moi, de m’enfermer dans ma tête et de me demander : que vat-t-il m’arriver dans le futur ? Mais que se passe-t-il ici et maintenant ?

Il n’y que très peu de circonstances qui autorisent l’existence de l’anxiété et de la panique dans l’instant présent. Il s’agit du danger qui se manifeste concrètement devant moi. Par exemple, le danger que peut représenter la présence d’un ours. Si un ours me pourchasse, l’anxiété et la panique sont les directives du moment. Il me faut fuir, impérativement ! Mais combien de fois un simple appel téléphonique m’a-t-il paru être aussi gros qu’un ours ? Ou un texto m’a-t-il paru être aussi effrayant qu’un lion ? Lorsque je suis pleinement présent dans le moment présent, je perçois bien ce qui est réel, ce qui est réellement en train d’arriver. S’agit-il réellement d’un ours ?

Quand j’observe ce qui est en train de se passer maintenant, j’en viens à réaliser que les choses qui m’arrivent sont, le plus souvent, des événements très simples.

Je peux donc en déduire que la panique que je ressens face à des événements mineurs provient de mes associations d’idées, de choses auxquelles je pense, de broderies autour de tout ce qui pourrait arriver, comme, par exemple, concevoir que ce qui est arrivé dans le passé va inéluctablement se reproduire dans le futur. Ces sentiments sont rarement connectés à ce qui est en train de se passer ici et maintenant.

Si je suis entièrement présent au moment présent, je peux penser et agir beaucoup mieux que si j’étais enfermé dans ma tête, en train de penser à ma vie passée ou à ma vie future.

Où suis-je à cet instant ? Qu’est-il en train de se passer ici et maintenant ? Dès que je commence à prendre conscience de tout cela, je commence à percevoir que la vie considérée dans son ensemble vaut la peine d’être vécue telle qu’elle est en réalité.

Troisième principe : Un film, c’est un film

Le troisième principe consiste à réaliser qu’un film, ce n'est qu'un film, que ce n’est jamais la réalité. C’est prendre conscience que quand je pense à l’avenir, ce à quoi je pense n’est pas réel. Ce n’est qu’un enchaînement de présuppositions, ce n’est qu’une histoire que je m’invente.

Cela implique que je doive apprendre à distinguer les faits réels de l’interprétation que je leur donne. C’est la différence entre ce qui est effectivement en train de se passer et ce que je crois être en train de se passer. Quand je considère les choses qui sont en train de se passer, les faits sont finalement quelque chose de très simple à observer.

Voici un exemple. Je regarde l’heure. Je suis attendu à mon travail à trois heures. Or il est trois heures vingt. Je suis donc en retard. J’imagine aussitôt qu’il va se passer un tas de choses, comme, par exemple, le fait d’être renvoyé par mon employeur, la possibilité de me retrouver à la rue, et, de fil en aiguille, la perspective de me retrouver rapidement sous une dalle de cimetière. Ce sont là autant de pièces rajoutées à la réalité qui vont causer un état de panique et d’anxiété.

Voici un autre exemple. J’attends un texto de la part d’une personne de mon entourage. Un jour passe, un deuxième jour passe et je n’ai toujours pas reçu de message. Je commence alors à paniquer et à m’inventer des histoires. Gardons à l’esprit que ces histoires ne sont pas réelles, ce sont des produits de mon imagination, juste des histoires. Dès que je commence à prendre ces produits de mon imagination pour des réalités, je commence à les interpréter comme s’il s’agissait de vérités toutes faites et j’en tire des conclusions du type : cette personne ne m’aime pas, cette personne est fâchée contre moi, il y quelque chose qui cloche en moi, etcétéra. Or, à la fin de la deuxième journée, je reçois un texto qui me dit : « Excuse-moi, j’étais très occupée par le travail, n’oublie pas que je t’aime. » L’histoire que j’ai créée de toutes pièces, j’aurais très bien pu en faire une toute autre, du type : cette personne est au travail, elle est très occupée mais ce qu’elle fait va contribuer à rendre notre monde meilleur et je suis tellement fier qu’elle fasse partie de ma vie…

Quand je vis pleinement dans l’instant présent, il n’y a pas de place pour des histoires de ce genre. Tout ce qu’il y a, c’est ce qui est en train d’arriver réellement à cet instant précis. Quand je commence à construire une histoire, je suis seul responsable de cet environnement mental propice à la panique. J’échafaude des hypothèses et je les superpose les unes sur les autres, j’imagine une série d’événements en chaîne, qui ne sont que le fruit de mon imagination et soudain, je me mets à réagir à tous ces incidents probables comme s’ils étaient vraiment réels.

Mon futur n’est jamais qu’une histoire, tout comme mon passé est une histoire, une relecture de la réalité telle que je l’ai perçue personnellement et interprétée à partir de mon point de vue personnel. En fait, tout est une histoire, exception faite de cet instant présent dans lequel je me trouve. Dès lors que je prends conscience de cela, je peux reconfigurer ma vie entière d’une toute autre manière. Je peux recréer entièrement mon histoire du futur, projeter en avant d’autres événements. Et la raison pour laquelle je peux recréer ma vision du futur est simple : le futur n’existe pas.

Quatrième principe : Élargir son champ de conscience

Cette partie est certainement la plus puissante de toutes. Il est possible d’observer qu’il existe un point commun entre toutes les personnes qui parviennent à changer d’état d’esprit, qui arrivent réellement à passer de la panique à la liberté, de passer d’un état où elles vivent dans l’anxiété à un état dans lequel elles font l’expérience de la paix intérieure. Ce point commun à toutes ces personnes est qu’elles l’ont fait pour quelque chose de plus grand qu’elles, quelque chose de plus élevé que simplement « soi-même ». Cela donne une motivation et une inspiration extraordinaires pour opérer ce changement.

Cette expansion de mon champ de conscience est une force susceptible de me propulser en avant : elle peut me permettre de passer de ce que j’ai été jusqu’à présent à quelque chose de totalement nouveau.

Cela me demande de sortir du schéma habituel, celui auquel j’ai sans doute été habitué, pour lequel j’ai été conditionné, à savoir le schéma égoïste. Jusqu’ici, on m’a très souvent appris qu’il fallait apprendre à faire les choses par moi-même et pour moi-même, construire mon propre avenir dans une dynamique du chacun pour soi, dans un esprit de compétition, selon un schéma élitiste, et que le meilleur gagne ! On m’a souvent laissé entendre que l’altruisme, le fait de faire les choses pour autrui, était quelque chose d’artificiel, voire une forme de lâcheté ou de faiblesse. On m’a fait croire que cela correspondait à un schéma par lequel je cherchais peut-être une forme de gratification en dehors de moi-même, une forme de reconnaissance de la part d’autrui. D’une certaine manière, cela insinue que je fais erreur quand je fais les choses pour d’autres personnes que simplement moi-même.

Pour créer quelque chose de nouveau, j’ai besoin de nouveaux ingrédients. Cela peut être mon époux, mon épouse, cela peut être mes enfants, cela peut être ma famille, cela peut être un groupe, une communauté, cela peut être toute l’humanité. Il est important que je me pose cette question fondamentale : Pour qui vais-je faire cela ? Quelle est la raison pour laquelle je vais le faire ? Quelle est ma motivation profonde ? Est-ce assez grand ? Est-ce une raison suffisamment importante que pour me mettre en mouvement et me permettre d’aller du point où je me trouve aujourd’hui au point où je souhaite arriver demain?

Du point de vue spirituel, je réalise à quel point tout est interconnecté. Je réalise que cet élargissement de mon champ de conscience n’est pas là juste pour moi tout seul, mais que cela engage tout le monde ; de fait, tout ce que je fais a des répercussions sur le monde entier. Cela donne une formidable motivation pour opérer ce changement, ce passage de la panique à la liberté. Je prends conscience que si je fais ce changement en moi-même, je le fais pour la Création entière. Et le point de départ pour cette belle aventure est à ma portée immédiate: cela commence ici et maintenant, dans la plénitude du moment présent.


Extrait d'une vidéoconférence intitulée "From Panic To Freedom"

(Traduction et adaptation française © Phil Edengarden)

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