RETOUR

LOUER, CE N’EST PAS PRIER.

Ce texte fait une distinction entre différentes formes de communication avec le créateur. Les écritures nous invitent à louer notre créateur, mais ce n'est pas la même chose que le prier.

Louer, ce n’est pas prier. Nous pourrions tourner cette formule dans l’autre sens et affirmer que prier, ce n’est pas louer. Si je me permets de venir à vous ce jour avec cette affirmation que certains trouveront curieuse, c’est tout bonnement parce que j’ai pu observer à de maintes reprises à quel point la confusion peut régner dans les réunions d’assemblées auxquelles j’ai pu participer jusqu’à présent.

La prière est une pratique courante, même parmi les païens. Qui n’exprime pas à son dieu ou à l’une des idoles du panthéon, au Cosmos ou ailleurs, le désir qu’une solution soit apportée à un problème inextricable, qu’un dénouement heureux vienne conclure une démarche périlleuse ? Prier n’est pas juste émettre un souhait de manière diffuse, en croisant les doigts ou en touchant du bois, en allumant un cierge ou en s’adressant à un tiers, qu’il soit curé, gourou, marabout, rebouteux ou autre faiseur de miracles, pour qu’il se charge de la besogne à notre place. Prier exige qu’on s’adresse soi-même à une instance supérieure, quelle que soit l’image qu’on s’en fait, pour demander une faveur. Nous retrouvons ce terme dans certaines formules de politesse comme, par exemple : « Je vous prie de bien vouloir accepter mes excuses». Prier, c’est demander.

Prier D.ieu, consiste donc à demander une faveur à D.ieu. Quand les apôtres demandent à Yéchoua de leur apprendre à prier, Yéchoua leur enseigne le « notre père », un texte qui comporte sept demandes adressées à D.ieu.

Louer, ce n’est pas prier. Le dictionnaire Larousse définit clairement en quoi consiste la louange : C’est « l’action de célébrer le mérite de quelqu'un, de quelque chose. » Nous pouvons donc faire cela pour vanter les qualités d’un aspirateur qui nous donne satisfaction ou pour exprimer notre admiration pour une personne qui vient de remporter un marathon. Mais attention : louer, ce n’est pas flatter. Flatter, toujours selon la définition du dictionnaire, c’est caresser dans le sens du poil, c’est chercher à plaire à quelqu’un par des compliments excessifs, intéressés, c’est faire paraître quelqu’un plus beau qu’il n’est en réalité. Autrement dit, une flatterie est un mensonge alors que la louange trouve son fondement dans la vérité.

La lettre aux Hébreux définit explicitement en quoi consiste la louange envers D.ieu : « Par lui, offrons sans cesse à D.ieu un sacrifice de louange, c'est-a-dire le fruit de lèvres qui confessent son nom » (Hébreux 13,15). Quand elle s’adresse à D.ieu, la louange se préoccupe donc de ce que D.ieu est. En d’autres termes, elle met l’accent sur l’immensité de D.ieu, sur ses qualités, sur ses compétences, sur tous les aspects de sa majestueuse personne. Louer D.ieu, c’est braquer tous les projecteurs sur lui et l’applaudir. Cela peut se faire en fanfare, mais ce n’est pas indispensable. Notez au passage qu’il y a très peu de chants d’église qui soient de véritables louanges à D.ieu, des compliments qui s’adressent directement à Lui. Le plus souvent, ce ne sont que des invitations à Le louer, à Le célébrer, à L’adorer, à dénombrer ses bienfaits, etcétéra. On s’adresse aux gens, mais pas à D.ieu. Et c’est sans compter tous ces chants qui commencent par « Je » : « Je veux », « Je sais », « Je viens », « Je te donne » et, pire encore : « Je te louerai », sans doute un jour prochain ? Enfin, il y a tous ces cantiques qui font certes étalage des nombreuses qualités de D.ieu mais parlent de lui à la troisième personne ; on ne s’adresse donc pas à lui, personnellement, à tel point qu’on peut se demander si sa présence est vraiment requise lorsqu’on récite un texte de ce genre. Oui, frères et sœurs, le répertoire des chants chrétiens qui louent D.ieu face à face est aussi maigre que peut l’être un top model anorexique placé à côté d’un charter de personnes obèses en partance pour Honolulu. C’est à se demander si les enfants de D.ieu manquent d’inspiration pour louer D.ieu.

Si vous êtes du nombre de ceux et de celles dont la source d’éloges envers D.ieu se tarit en moins de deux minutes, j’ai une bonne nouvelle pour vous : ce n’est pas un mal incurable ! Nous l’avons rappelé tout à l’heure, la louange se préoccupe essentiellement de ce que D.ieu est. De plus, nous pouvons focaliser notre attention tantôt sur le père, tantôt sur le fils, ce qui multiplie encore le nombre des possibilités. Et vous allez le constater rapidement : une fois que la machine est en marche, on ne peut plus l’arrêter tant les raisons de louer D.ieu sont innombrables. Nous ne parlons pas de dizaines voire de centaines, nous ne parlons pas de milliers ni de millions, nous parlons d’infini. La quantité de choses que nous pouvons dire à D.ieu pour le louer est impossible à dénombrer !

Quand nous choisissons de louer D.ieu pour ce qu’il est, nous pouvons prendre la création comme point de départ. Chacune des créatures que D.ieu a faites est extraordinaire. Placez devant vous un seul organisme vivant, que ce soit un végétal, un animal ou un minéral et observez-le attentivement pendant un moment. Vous constaterez à quel point tout est parfait au niveau de sa conception originelle : la texture, la couleur, le parfum, la température, la manière avec laquelle D.ieu a prévu que cette chose doive se développer, se reproduire, se régénérer, interagir avec l’environnement, remplir telle ou telle autre fonction particulière, etcétéra, etcétéra, etcétéra. Tout cela n’est-il pas digne de louange ? Alors, allez-y, louez D.ieu pour cette chose que vous venez d’admirer. Adressez-vous à Lui et sans façons, avec vos propres mots, ou avec des applaudissements. N’attendez pas : dites Lui à quel point il est formidable, à quel point vous trouvez qu’il est génial !

Une fois que vous avez compris le processus, vous pouvez le répéter à l’infini pour à peu près tout ce qui se présente à vous au cours d’une journée. Croyez-moi, il y a de quoi louer D.ieu tout le temps. Si vous êtes de ceux ou de celles qui ont tendance à voir le verre à moitié vide alors qu’il est à moitié plein, rappelez-vous qu’il y a toujours moyen de tourner les choses pour qu’elles profitent à D.ieu, pour qu’elle concourent à le louer. Vous connaissez peut-être cette note d’humour qui met en scène François d’Assise alors qu’il se promène dans une clairière en compagnie d’un frère. Comme de coutume, François s’extasie de tout ce que D.ieu a créé. Il voit une jolie pâquerette sous ses pieds et le voici qui dit à D.ieu : « Oh Seigneur, je te loue pour sœur pâquerette, que tu as créée avec autant de simplicité et autant de délicatesse ». Puis il voit un vieux chêne au sommet d’une colline et il s’écrie : « Oh Seigneur, je te loue pour frère arbre, que tu as créé avec autant de noblesse et de majesté ! ». Malencontreusement, un oiseau passe au-dessus des deux hommes à ce moment précis et lâche sa cargaison de fiente en plein dans le mille, sur le crâne de François. Le frère qui l’accompagne se dit en lui-même : « C’est facile de louer D.ieu quand tout est beau autour de soi, mais là, il n’y a vraiment pas de quoi louer D.ieu pour ce caca d’oiseau ! » Mais contre toute attente, François poursuit sa louange à D.ieu en ces termes : « Oh Seigneur, je te loue pour sœur vache, que tu as eu la sagesse de ne pas créer avec des ailes ! ».

Cette attitude est celle qu’adopta la sœur de Corie Ten Boom au camp de concentration de Ravensbrück, durant la deuxième guerre mondiale. Le baraquement dans lequel Corie et sa sœur furent enfermées était infesté de poux. Au lieu de s’en plaindre, la sœur de Corie se mit à louer D.ieu d’avoir créé les poux et de les avoir donnés comme compagnons d’infortune aux malheureuses femmes de ce dortoir. Un peu plus tard, ces femmes réalisèrent que les gardiennes du camp ne pénétraient jamais dans ce baraquement à cause de ces poux, qu’elles craignaient d’attraper, ce qui permit aux occupantes de tenir des études bibliques impossibles à organiser autrement.

Cette attitude est également celle qu’adopta Yéchoua lui-même lorsque, tressaillant de joie par le saint-esprit, il s’écria soudain : « Je te loue, père, créateur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que tu les as révélées aux petits enfants. Oui, père, je te loue parce que tu as voulu qu’il en soit ainsi » (Luc 10 :21) Nous remarquons, au travers de ces quelques exemples, que la louange ne se préoccupe pas des apparences extérieures mais qu’elle met en avant la sagesse de D.ieu, qui ordonne toutes choses, jusque dans les moindres détails, selon un plan déterminé d’avance. Notre univers n’est pas, comme l’affirment certains scientifiques athées, sujet au hasard. Nous ne sommes pas livrés à nous même au beau milieu de nulle part. Le monde n’est pas comme un caillou catapulté à toute vitesse par je-ne-sais-quel-cinglé en direction d’un mur sur lequel il finira par s’écraser tôt ou tard. Non, il en est l’heureux commencement, et il en est l’heureux aboutissement. Je te loue, D.ieu du ciel et de la terre, d’être l’alpha et l’oméga, le commencement de toutes choses et la fin !

Mais attention, ne confondons pas la louange avec l’action de grâce. L’action de grâce, c’est la moindre des politesses ; cela consiste à exprimer sa gratitude. Prenons un exemple. Imaginons que mon épouse cuisine un plat de lentilles. Une chose est de remercier mon épouse pour le plat de lentilles qu’elle vient de servir à table, autre chose est de déclarer que sa recette de lentilles est la meilleure qui existe dans la région. Exprimer sa reconnaissance ou faire des compliments, ce n’est pas la même chose.

Dans notre relation avec D.ieu, dire merci à Yéchoua parce qu’il nous a sauvé ou guéri par miracle d’une infirmité, c’est de l’ordre de l’action de grâce. Mais Lui dire que lui seul peut sauver de la mort, que lui seul peut apporter une guérison authentique et durable, c’est du domaine de la louange. Dans la louange, l’éloge que nous pouvons faire de son être, de ses qualités intrinsèques, peut être complété par la glorification de ses actions les plus éclatantes. Lorsque D.ieu permit au peuple hébreu de traverser la mer rouge à pied sec et d’échapper ainsi à la main de Pharaon, il y avait là, sur le moment, de quoi lui rendre grâces. Mais plusieurs dizaines de siècles plus tard, si je ne suis pas Juif, je n’ai aucune raison objective de rendre grâces à D.ieu pour cet événement qui ne me concerne pas directement. Par contre, je peux le louer pour ce qu’il a fait en affirmant notamment qu’il est un D.ieu puissant qui, comme l’affirme le cantique de Moïse, en Exode 15, 1-21, « a fait éclater sa gloire; Il a précipité dans la mer le cheval et son cavalier. »

La louange est gratuite, désintéressée, et tournée exclusivement vers D.ieu, non pas vers nous-mêmes ou ce que D.ieu nous apporte. Cela signifie-t-il que nous ne puissions pas parler de nous lorsque nous louons D.ieu ? Bien sûr que non. Mais si nous voulons qu’il s’agisse véritablement d’une louange adressée à D.ieu, nous ne pouvons le mettre au premier rang que si nous nous positionnons à l’arrière plan, à la manière d’une ombre, qui fait mieux ressortir le sujet d’une photographie. Nous ne pouvons l’élever que si nous nous plaçons en dessous de lui, comme un trait de soulignement donne de l’importance à une phrase. Par exemple, faire à D.ieu l’aveu de ma médiocrité ne fait que mieux ressortir la splendeur de sa sainteté. Cet aveu personnel est donc utile à la louange.

Cependant, une bonne connaissance de l’écriture et du plan du salut permet de faire briller D.ieu avec d’avantage encore d’intensité. Exposer ma misère et, dans le même temps, magnifier la sainteté de D.ieu est une chose, mais glorifier D.ieu pour sa miséricorde infinie et pour les moyens qu’il a mis en œuvre pour me rendre, au final, participant de sa propre vie dans la gloire, est une chose plus excellente encore. Partir de notre observation de la réalité pour louer D.ieu, c’est déjà ça. Mais nous appuyer sur la parole de D.ieu, proclamer tout ce que D.ieu a révélé de lui-même et de ses actions éclatantes, il n’y a pas mieux.

Le fruit d’une louange authentique est de réveiller notre foi, de l’augmenter. Voilà pourquoi il est toujours bon de louer D.ieu avant de lui demander quelque chose. Non pas parce qu’il aurait besoin de se sentir flatté pour pouvoir nous accorder une faveur, mais parce que de l’image que nous avons de D.ieu dépend notre confiance dans sa capacité à nous répondre. Demander une grâce à une personne distante, lointaine, dont on ne connait pas l’amour, dont on ne connaît pas la véritable puissance, cela revient à jouer au Lotto, à lancer des dés sur la table d’un casino. En général, les personnes pour qui D.ieu exauce néanmoins de telles prières demeurent dans le doute et l’incertitude, car elles ne savent pas si la réponse vient de D.ieu ou si c’est le fait du hasard, de la chance, du destin. Elles n’expriment donc que très peu de gratitude envers D.ieu. En revanche, demander la même faveur à une personne proche, dont on reconnaît sciemment la longueur, la largeur, la hauteur, la profondeur de l’amour, dont on proclame les hauts-faits, cela procure l’assurance d’être exaucés. Dans tel cas, nous exprimons sans hésiter notre reconnaissance à D.ieu avant même d’avoir reçu la réponse, tant la confiance que nous avons d’être aimés, écoutés, entendus, secourus est intense.

Il n’est donc pas étonnant que, par l’entremise des apôtres (notamment en Romains 15 :11 ou Ephésiens 5 :19) D.ieu nous fasse part de la nécessité de le louer. Il veut, par cette voie, se faire connaître de nous. Il veut, par ce moyen, faire grandir notre homme intérieur et fortifier notre foi. Il veut également, par cet entraînement régulier, nous préparer à notre destinée ultime, à ce dont nous ferons un jour l’expérience dans sa gloire. Je terminerai donc par là, avec cette vision d’apothéose stimulante, en vous lisant un extrait du Livre de l’Apocalypse (Apocalypse 5 :11-13) : « Je regardai, et j'entendis la voix de beaucoup d'anges autour du trône et des êtres vivants et des vieillards, et leur nombre était des myriades de myriades et des milliers de milliers. Ils disaient d'une voix forte: L'agneau qui a été immolé est digne de recevoir la puissance, la richesse, la sagesse, la force, l'honneur, la gloire, et la louange. Et toutes les créatures qui sont dans le ciel, sur la terre, sous la terre, sur la mer, et tout ce qui s'y trouve, je les entendis qui disaient: À celui qui est assis sur le trône, et à l'agneau, soient la louange, l'honneur, la gloire, et la force, aux siècles des siècles! »

Phil EDENGARDEN © 2018

→ Retour au sommaire